ousiologie

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LA SUBSTANCE CHEZ ARISTOTE

            De tout temps l’être a constitué une véritable difficulté dans la tradition de la pensée métaphysique c’est-à-dire dans toute la philosophie s’étendant des premiers penseurs Grecs jusqu’aux penseurs des temps modernes. Ces difficultés proprement ontologiques elle les engage qui plus est sous l’angle de l’interprétation, de la question du sens et de l’acception de la notion la plus générale de toutes. De la différence des réponses sur cette question, Aristote pour soutenir son indépendance intellectuelle par rapport aux thèses maîtresses des philosophes d’alors, se propose d’élaborer un dépassement et d’asseoir d’autres formes de pensées.

            C’est en effet dans ce cadre qu’intervient le texte  du livre z de Métaphysique d’Aristote. Dans ce texte où il nous entretient sur l’être, face à la question de savoir : qu’est-ce que l’être  ? Aristote affirme que c’est la substance. Pour ce faire, il argumente sa thèse autour de trois mouvements :  

            Des l’abord de ce texte, Aristote justifie que la substance est la première catégorie de l’Être. En effet, l’Être se dit de plusieurs manières et cette évidence est constamment affirmée par le langage. Ses multiples sens de l’Être ne sont pas indéfinis et c’est à juste titre que Aristote affirme que « l’Être se prend en de multiples sens » et cela ajoute t-il « suivant la distinction que nous avons précédemment faites dans le livre des acceptions multiples ». L’inventaire de ses manières d’être de l’Être est ce qu’il appelle catégorie, en ce que l’Être comparait sous différentes formes c’est-à-dire en tant qu’être quantité, qualité, lieu, relation, etc. Il affirme cela en disant que l’être « en un sens (…) signifie ce qu’est la chose, la substance, et, en un autre sens, il signifie une qualité, ou une quantité, ou l’un des autres prédicats de cette sorte. »
L’Être apparaît dès lors comme le prédicat le plus universel qui se dit de tout mais dont on ne peut rien dire, tout en précisant que l’universel est toujours prédicat d’un sujet et est commun à plusieurs. Dans les catégories dans lesquelles s’exprime l’
Être, apparaît une catégorie trans-catégoriale, c’est-à-dire une catégorie se situant au-delà des catégories et qui représente l’Être dans sa première acception. Cette catégorie qui est « l’Être au sens premier » est le « ce qu’est la chose » notion qui n’exprime rien d’autre que la substance ».

Aristote nous montre par là qu’a l’interrogation qu’est-ce que l’être ? On découvre la substance, comme la détermination essentielle de l’être, sa signification intrinsèque, dès lors toutes les autres déterminations lui sont relatives. Mais cette détermination ou catégorie radicale est elle-même attribuée à la réalité existante, singulière, substance : par exemple, c’est à Louis qu’on attribue homme. La substance est l’être par excellence, tandis que les autres êtres sont être de l’Être. Ainsi, les autres êtres de l’Être représentent une attribution de la substance première, mais une attribution « d’un genre à part ». Nous pouvons donc d’une même manière attribuée homme et philosophe à Aristote, cependant homme est première à philosophe car Aristote bien avant d’être philosophe est homme et c’est en cela qu’on dit que la substance seconde caractérisant les autres êtres est une attribution de la substance première. C’est aussi pourquoi, le qu’est ce que cette chose ? représente pour Aristote la question fondamentale de tout objet de recherche, car « lorsque nous disons de quelle qualité est telle chose déterminée, nous disons qu’elle est bonne ou mauvaise, mais non qu’elle a trois coudées ou qu’elle est un homme ou un dieu ; et cela est exprimé par le langage en ce qu’il marque une distinction entre la chose et ses qualités. La détermination essentielle est donc encore relative d’une certaine manière à la réalité existante. On pourrait dire que cette première démarche d’Aristote de soutenir le fait que la substance est la première catégorie de l’Être, comme une induction en ce qu’elle part du particulier au général, dévoile la signification première à savoir celle qui est antérieure à toutes les autres, et la réalité fondamentale existante, sujet radical de toutes les attributions. Il s’agit donc bien d’une démarche épagogique précisant ce qui est premier dans un ordre donné ; celui de l’attribution. Par ailleurs, cet ordre de l’attribution est exprimé par le langage, mais implique une réalité moindre c’est-à-dire sous-jacente dépendante d’une réalité primordiale.

         De même, les êtres particuliers dépendent de l’Etre en tant qu’être, c'est-à-dire la substance. En effet, Aristote nous révèle le caractère transcendantal de l’être, puisqu’il existe une diversité d’êtres. La substance en tant que ce qui est reçoit son existence d’elle-même, alors que les autres êtres qu’il appelle « les autres choses » dépendent tous de la substance. Pour lui une qualité ou une quantité ou encore une manière d’être, de se comporter, ne peut jamais avoir pour nom « Etre », car, tous ces éléments n’ont aucune existence et selon ses mots n’ont pas eux-mêmes « naturellement une existence propre ». Ils doivent leur existence d’un être fondamental qui est de catégorie suprême. Et comme illustration, il dit : « Le être assis, le se promener, le se porter bien », ne sont que des « êtres »qui n’ont aucune signification, même pas un sens. Ils n’auront de sens ou de signification que s’ils sont personnifiés, et dans ce cas on dira plutôt « ce qui se promène, ce qui est assis, celui qui se porte bien », c'est-à-dire que ces êtres ne se disent pas sans sujet sans implication de l’individu, c’est la substance. Or le sujet ou l’individu c’est la substance, et si nous apprécions ou nous disons que l’individu est comme ceci ou comme cela, nous ne faisons qu’énumérer les attributs de l’être et ces attributs sont ce qu’Aristote appelle les « catégories de l’Etre », car, elles sont selon lui des « modes d’être » de l’Etre. Toutefois, Aristote souligne que la substance même est aussi une catégorie, mais une catégorie « trans-catégoriale » pour emprunter les mots de Levinas.

Si pour Aristote il y a une distinction effective entre « Etre » et « êtres », cette distinction se situe non pas au niveau du nombre ou du genre, mais au niveau de la dépendance, en ce sens que c’est le premier qui donne vie au second, et donc sans l’être, c’est à dire la substance, il n’y aura pas d’existence de ces êtres. Il est pour ainsi dire « le premier moteur » qui meut les autres. Il est donc substantiel, en ce sens qu’il demeure incontournable dans la recherche de la conscience de l’être.

 

 

         Aristote affirme La primauté de la substance dans la recherche de la connaissance de l’être. Dans cette partie, il recherche ce qui est au gisant des catégories de l’être. C’est pourquoi, il ne met pas l’accent sur les autres prédicats de l’être mais ce qui « parmi toutes les acceptions de l’être » ce qui est premier. Aristote cherche à savoir le fait pour une chose d’exister en réalité par opposition à la virtualité. Pour Aristote, « ce qu’Est la chose », l’être au sens premier n’est rien d’autre que la substance, réalité sans laquelle les autres ne peuvent être ; c’est la catégorie première, Etre qui se suffit lui-même, sujet ultime et support des autres catégories. Aussi pour Aristote, on ne peut définir un être sans que nécessairement soit contenu logiquement la substance et que sa connaissance soit antérieure à la connaissance de chaque être. En effet, logiquement la connaissance de chaque être repose d’abord sur la connaissance de son prédicat qui nécessite nécessairement la connaissance de l’essence du prédicat. Or selon Aristote il existe un prédicat qui transcende les autres prédicats en étant lui-même prédicat : c’est la substance. Donc on ne connaît parfaitement un être que si nous connaissons la substance de cet Etre, car c’est elle qui nous donne la connaissance parfaite de chaque chose. Aristote vient donc d’inaugurer une nouvelle métaphysique de l’Etre en tant qu’Etre. Après d’avoir dans le livre E déterminer l’objet de la métaphysique, qui est l’Etre selon les différentes catégories, à l’exclusion de l’Etre par accident et de l’Etre comme vrai, Aristote se demande ce qu’est l’Etre, et il répond que c’est la substance, car c’est elle qui nous fait connaître les choses, et cette substance n’est rien d’autre que la quiddité, la substance formelle. La substance formelle, à laquelle se rapporte toutes les autres catégories, elle devient ainsi, à la suite de plusieurs éliminations, le principal objet de la philosophie première. C’est pourquoi, pour Aristote la question « qu’est-ce que l’Etre ? » que ses prédécesseurs ont essayé de répondre se ramène à la question « qu’est-ce que la substance ? » puisque  la connaissance de l’être n’est possible que si nous connaissons la substance, cette substance faisant l’objet d’une pluralité d’opinions, de contrariété d’affirmation: pour les uns notamment l’école de Milet et l’école d’Elée[1] ont affirmé l’unité de la substance alors que Empédocle et les Pythagoriciens[2] soutiennent la pluralité  de la substance, cette pluralité étant limitée en nombre,à l’opposé où Anaxagore et les atomistes[3], qui, pour eux cette pluralité est infinie, illimitée en nombre. Ainsi donc, Aristote ayant inaugurée la nouvelle voie de la philosophie première préconise que la connaissance de l’Etre en tant qu’Etre, ce qui constitue essentiellement la nature des substances individuelles revient à la connaissance de la substance d’où la question « qu’est-ce que l’Etre ? » revient à « qu’est-ce que la substance ? » voie unique, principale dans la philosophie première.   

 

 

            Au terme de notre cheminement avec ce texte extrait du livre Z de la Métaphysique d’ARISTOTE, il est clair qu’à la seule question : qu’est ce l’Etre ? Revient à se demander qu’est ce que la substance ? Car l’Etre au sens premier reste le « ce qu’est la chose ». Autrement dit, c’est « le gisant au font des choses » selon Emmanuel MARTINAU. Cependant on comprend mieux  Aristote en ce qu’il est évident donc que c’est par le moyen de cette catégorie c'est-à-dire la substance que chacune des autres catégories existe. Dans cette optique, la question de l’avant-garde de nos préoccupations élevé la substance absolument première à l’état sépare. En ce sens que l’Etre absolument parlant ne saurait être que la substance. Ceci étant Jacques DERRIDA a le mérite de soutenir la substance comme ayant un statu spécial, puisque pour lui, elle est la condition hors catégoriale des catégories. De cette façon éclatante, il nous apparaît que la rencontre avec l’illusion demeurera à jamais dans l’oubli. Car le stagirite nous a ouvert les yeux sur la question de l’Etre qui n’est rien d’autre que la question de la substance.

 



[1] Aristote, la métaphysique, 1028b, Tome 1. Tricot p.349

[2] Idem

[3] Idem



23/06/2008
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